Célébration du 24 Février 1956 et du 24 Février 1971 - Deux dates aux destins opposés
Sans être rébarbatif, et pour rester collé à l’actualité, le choix de la chronique du jour s’est imposé de lui-même, à l’occasion de la célébration du double anniversaire hautement symbolique du 24 février 1956 (création de l’UGTA) et du 24 février 1971 (nationalisation des hydrocarbures). Deux dates qui ne connaîtront pas le même traitement dans la philatélie algérienne. Encore, on retiendra que la Poste mettra beaucoup de temps pour décider de commémorer l’anniversaire de l’UGTA, trente ans après sa création.
Bien que ce syndicat, l’unique reconnu par les pouvoirs publics en Algérie, servira depuis l’indépendance de l’Algérie d’outil dans les enjeux politiques pour le maintien au pouvoir. Il demeure de nos jours l’allié principal de ceux qui décident du sort des Algériens depuis au moins deux décennies. Un syndicat qui s’acharne à défendre les droits des exploiteurs et non ceux des travailleurs.
Curieusement, c’est à l’époque de Chadli Bendjedid que cet événement sortira de l’anonymat. Sur un timbre émis en 1986, l’artiste-peintre, Sid Ahmed Bentounes, puisera dans les symboles de l’UGTA pour dessiner deux mains serrées en signe de solidarité, surmontées d’un croissant et d’une étoile, sans pour autant recourir au logo très connu de cette organisation syndicale. Vingt ans plus tard, une seconde vignette commémorative du 50e anniversaire de l’UGTA, œuvre du même dessinateur, apportera un fait nouveau, mais qui aura un goût d’inachevé. Le premier secrétaire général de l’UGTA, Aïssat Idir, apparaîtra pour la première fois sur un timbre, mais sans aucune mention de son nom. Comme quoi, on fait toujours les choses à moitié.
L’histoire de l’UGTA, fondée le 24 février 1956 dans la mouvance du FLN par Aïssat Idir, Mohamed Flissi, Benyoucef Ben Khedda, Benaïssa Atallah, Abane Ramdane, Hassan Bourouiba et Tahar Gaïd, sera confisquée par des cercles qui feront tout pour mettre aux oubliettes les sacrifices de ces pionniers. Certains, comme Abane Ramdane, seront même persona non grata dans les cérémonies officielles. Toutefois, si la date du 26 février 1956 a réussi à se faire une place dans le catalogue philatélique algérien, parallèlement, on n’arrive toujours pas à expliquer l’occultation de la nationalisation des hydrocarbures.
Un événement qui n’a jamais bénéficié de la moindre commémoration sur des timbres, même durant le règne de Boumediène. Une sorte d’amnésie qui se poursuit jusqu’à nos jours. L’histoire retiendra quand même que la décision annoncée le 24 février 1971 par le défunt président Houari Boumediène de nationaliser les hydrocarbures algériens, dont l’ensemble des gisements naturels de gaz et de pétrole, tout comme les oléoducs et les gazoducs, neuf ans après l’indépendance, aura une importance capitale.
Faisant suite au refus des compagnies pétrolières françaises de renégocier les prix, elle sera qualifiée de «décolonisation économique», après «la décolonisation géographique». On se rappellera toujours, pour ceux qui lisent l’histoire, que ce pas audacieux franchi par l’Algérie inspirera d’autres Etats. On citera le cas de la Libye, qui décidera, dix mois plus tard, de nationaliser les avoirs de la British Petroleum (britannique). Le 1er juin 1972, c’est l’Etat irakien qui lui emboîtera le pas à travers l’expropriation du consortium étranger «Iraq Petroleum Company».
Alors qu’en est-il chez nous, où on n’ose plus parler de cette phase historique que la jeune génération, branchée sur d’autres mondes, ignore complètement ? Qui se souvient du fameux discours de Houari Boumediène qui annonçait son mémorable «Kararna ta’emime el mahroukate» (nous avons décidé de nationaliser les hydrocarbures). Une phrase qui changera le destin pétrolier de l’Algérie, après des années d’exploitation de ses richesses par les compagnies multinationales. Des richesses qui deviendront une véritable malédiction pour le pays. Houari Boumediène doit sûrement se retourner dans sa tombe.
Du : 21-02-2019
Auteur : Selmane Arslan
Source : El Watan (elwatan.com)